La tendance à les stigmatiser, le fait qu’ils se soient réunis géographiquement dans certaines zones, qu’ils soient parfois prêts à tous les petits jobs pour essayer de s’en sortir, qu’ils s’entassent dans des appartements de fortune, qu’ils aient du mal à communiquer,leur concède une aura assez péjorative. Quand il n’y a pas assez de travail, les immigrés sont accusés de « prendre » le peu disponible, quand des conflits et la violence éclatent dans les banlieues, ils sont directement montrés du doigt, lorsque la délinquance sévit, ils sont soupçonnés d’office. Il semble que le délit « de sale gueule » soit appliqué plus souvent aux immigrés qu’à toute autre personne. On les imagine en clan en train de fomenter toutes sortes de manœuvres pour se frayer une place au soleil et tirer leur épingle du jeu alors que la plupart du temps, ils tentent de s’intégrer sans faire trop de bruit pour ne pas déranger et entretenir le malaise les concernant. L’intégration n’est pas toujours évidente. Pourtant ces hommes et ces femmes ont fait au départ la démarche dans le but de trouver ailleurs ce qui n’existe pas chez eux, que ce soit une vie professionnelle décente, une liberté d’expression, cherchant à réussir leur vie et à aider ainsi ceux qui sont restés au pays.
De ce fait les populations locales se sentent souvent dépossédées de biens et d’avantages divers au profit des immigrés. Cette « jalousie », ce manque d’altruisme mais aussi le comportement de certains immigrés entretient, souvent, entre les deux communautés de fortes tensions. Il se dit que les immigrés profitent du système, des soins, de l’éducation, touchent des compensations financières des organismes sociaux, sans avoir toujours, en retour, un respect évident pour la main tendue. Au fil du temps, ils sont soupçonnés de malveillances diverses, de faire baisser la qualité du travail, de débarquer en masse et parfois illégalement dans le pays, de coûter cher, de ne pas toujours être vraiment « réglo » avec la loi. Leur appartenance religieuse, si elle est un peu trop « visible » tend également à les sectoriser, on leur reproche le fait d’entretenir leurs traditions, leurs us et coutumes sur un sol qui n’est pas concerné, et n’aurait pas à « subir » leurs particularités. Si à petite dose, ils ne paraissent qu’extravagants et que la curiosité offre une certaine distance, la concentration de ces signes et rituels, intrigue, inquiète et finit par agacer le reste de la population.
Progressent ensuite les idées proches du racisme qui les désignent comme menaçant l’identité nationale, la cohésion sociale, la sécurité, de part leurs agissements, leur mode de vie, et leurs présumés trafics. Des généralités qui ont lentement mais surement muri dans les esprits après des évènements particuliers, des cas par cas, dont les exactions et les faits divers se sont répandus à la vitesse grand V, relayés par l’ensemble des média, des discours politiques, et ont quasiment atteint aujourd’hui leur paroxysme. La suspicion est partout à la seule vue d’un groupe d’immigrés pour les plus intransigeants. Plus personne ne parle la langue de bois, le problème des immigrés, est évoqué dans toutes les campagnes électorales, et si les uns sont rassurants misant sur des mesures humaines et une organisation à long terme quant à la place des immigrés, que l’on a de toutes manières, dans un passé plus ou moins récent, accueillis, d’autres sont beaucoup plus radicaux envers eux. Les clichés les plus basiques et réducteurs nuisent aux immigrés et notamment aux jeunes, dans leur insertion sociale. Il leur faut souvent une énergie plus importante que les « autres » pour prouver qu’ils sont capables de suivre des études, d’accomplir un travail de qualité, de progresser positivement dans la société qui a bien voulu les accueillir. En fait il semble qu’ils devraient tout le temps se sentir redevables. Un sentiment difficile à vivre, qui leur fait mettre la barre si haut qu’ils sont parfois dépassés par le combat qui doit être, quotidiennement le leur. Des stéréotypes à prendre avec des pincettes par les observateurs qui ne prennent pas souvent le temps d’analyser le fond du problème de l’immigration.